domingo, 26 de febrero de 2006

Le Petit Prince


XXVI

IL y avait, à côté du puits, une ruine de vieux mur de pierre. Lorsque je revins de mon travail, le lendemain soir, j'aperçus de loin mon petit prince assis là-haut, les jambes pendantes. Et je l'entendis qui parlait:

-
Tu ne t'en souvens donc pas? disait-il. Ce n'est pas tout à fait ici!
Une autre voix lui répondit sans doute, puisqu'il répliqua:
- Si! Si! c'est bien le jour, mais ce n'est pas ici l'endroit...
Je poursuivis ma marche vers le mur. Je ne voyais ni entendais toujours personne. Pourtant le petit prince répliqua de nouveau:
- Bien sûr. Tu verras où commence ma trace dans le sable. Tu n'as qu'a m'y attendre. J'y serai cette nuit...
J'étais à vingt mètres du mur et je ne voyais toujours rien.
Le petit prince dit encore, après un silence:
- Tu as du bon venin? Tu es sûr de ne pas me faire souffrir longtemps?
Je fis halte, le coeur serré, mais je ne comprennais toujours pas.
- Maintenant va-t'en, dit-il... je veux redescendre!
Alors j'abaissai moi-même les yeux vers le pied du mur, et je fis un bond! Il était là, dressé vers le petit prince, un de ces serpents jaunes qui vous exécutent en trente secondes. Tout en fouillant ma poche pour en tirer mon révolver, je pris le pas de course, mais, au bruit que je fis, le serpent se laissa doucement couler dans le sable, comme un jet d'eau qui meurt, et, sans trop se presser, se faufilla entre les pierres avec un léger bruit de métal.
Je parvins au mur juste à temps pour y recevoir dans les bras mon petit bonhomme de prince, pâle comme la neige.
- Quelle est cette histoire-là! Tu parles maintenent avec les serpents!
J'avais défait son éternel cache-nez d'or. Je lui avait mouillé les tempes et l'avais fait boire. Et maintenant je n'osais plus rien lui demander. Il me regarda gravement et m'entoura le cou de ses bras. Je sentais battre son coeur comme celui d'un oiseau qui meurt, quand on l'a tiré à la carabine. Il me dit:
- Je suis content que tu aies trouvé ce qui manquait à ta machine. Tu vas pouvoir rentrer chez toi...
- Comment sais-tu?
- Je venais justement lui annoncer que, contre toute espérence, j'avais réussi mon travail!
Il ne répondit rien à ma question, mais il ajouta:
- Moi aussi, aujourd'hui, je rentre chez moi...
Puis, mélancolique:
- C'est bien plus loin... c'est bien plus difficile...
Je sentais bien qu'il se passait quelque chose d'extraordinaire. Je le serrais dans mes bras comme un petit enfant, et cependant il me semblait qu'il coulait verticalement dans un abîme sans que je pusse rien pour le retenir...
Il avait le regard sérieux, perdu très loin:
- J'ai ton mouton. Et j'ai la caisse pour le mouton. Et j'ai la muselière...
Et il sourit avec mélancolie.
J'attendis longtemps. Je sentais qu'il se réchauffait peu à peu:
- Petit bonhomme, tu as peur...
Il avait eu peur, bien sûr! Mais il rit doucement:
- J'aurai bien plus peur ce soir...
De nouveau je me sentis glacé par le sentiment de l'irréparable. Et je compris que je ne supportais pas l'idée de ne plus jamais entendre ce rire. C'était pour moi comme une fontaine dans le désert.
- Petit bonhomme, je veux encore t'entendre rire...
Mais il me dit:
- Cette nuit, ça fera un an. Mon étoile se trouvera juste au-dessus de l'endroit où je suis tombé l'année dernière...
- Petit bonhomme, n'est-ce pas que c'est un mauvais rêve cette histoire de serpent et de rendez-vous et d'étoile...
Mais il ne répondit pas à ma question. Il me dit:
- Ce qui est important, ça ne se voit pas...
- Bien sûr...
- C'est comme pour la fleur. Si tu aimes une fleur qui se trouve dans une étoile, c'est doux, la nuit, de regarder le ciel. Toutes les étoiles sont fleuries.
- Bien sûr...
- C'est comme pour l'eau. Celle que tu m'as donnée à boire était comme une musique, à cause de la poulie et de la corde... tu te rappelles...elle était bonne.
- Bien sûr...
- Tu regarderas, la nuit, les étoiles. C'est trop petit chez moi pour que je te montres où se trouve la mienne. C'est mieux comme ça. Mon étoile, ça sera pour toi une des étoiles. Alors, toutes les étoiles, tu aimeras les regarder... Elles seront toutes tes amies. Et puis je vais te faire un cadeau...
Il rit encore.
- Ah! petit bonhomme, petit bonhomme j'aime entendre ce rire!
- Justement ce sera mon cadeau... ce sera comme pour l'eau...
- Que veux-tu dire?
- Les gens ont des étoiles qui ne sont pas les mêmes. Pour les uns, qui voyagent, les étoiles sont des guides. Pour d'autres elles ne sont rien que de petites lumières. Pour d'autres qui sont savants elles sont des problèmes. Pour mon businessman elles étaient de l'or. Mais toutes ces étoiles-là elles se taisent. Toi, tu auras des étoiles comme personne n'en a...
- Que veux-tu dire?
- Quand tu regarderas le ciel, la nuit, puisque j'habiterai dans l'une d'elles, puisque je rirai dans l'une d'elles, alors ce sera pour toi comme si riaient toutes les étoiles. Tu auras, toi, des étoiles qui savent rire!
Et il rit encore.
- Et quand tu seras consolé (on se console toujours) tu seras content de m'avoir connu. Tu seras toujours mon ami. Tu auras envie de rire avec moi. Et tu ouvriras parfois ta fenêtre, comme ça, pour le plaisir... Et tes amis seront bien étonnés de te voir rire en regardant le ciel. Alors tu leur diras: "Oui, les étoiles, ça me fait toujours rire!" Et ils te croiront fou. Je t'aurai joué un bien vilain tour...
Et il rit encore.
- Ce sera comme si je t'avais donné, au lieu d'étoiles, des tas de petits grelots qui savent rire...
Et il rit encore. Puis il redevint sérieux:
- Cette nuit... tu sais... ne viens pas.
- Je ne te quitterai pas.
- J'aurai l'air d'avoir mal... j'aurai un peu l'air de mourir. C'est comme ça. Ne viens pas voir ça, ce n'est pas la peine...
- Je ne te quitterai pas.
Mais il était soucieux.
- Je te dis ça... c'est à cause aussi du serpent. Il ne faut pas qu'il te morde... Les serpents, c'est méchant. Ca peut mordre pour le plaisir...
- Je ne te quitterai pas.
Mais quelque chose le rassura:
- C'est vrai qu'ils n'ont pas le venin pour la seconde morsure...
Cette nuit-là je ne le vis pas se mettre en route. Il s'était évadé sans bruit. Quand je réussis à le joindre il marchait décidé, d'un pas rapide. Il me dit seulement:
- Ah! tu es là...
Et il me prit par la main. Mais il se tourmenta encore:
- Tu as eu tort. Tu auras de la peine. J'aurai l'air d'être mort et ce ne sera pas vrai...
Moi je me taisais.
- Tu comprends. C'est trop loin. Je ne peux pas emportes ce corps-là. C'est trop lourd.
Moi je me taisais.
- Mais ce sera comme une vieille écorce abandonnée. Ce n'est pas triste les vieilles écorces...
Moi je me taisais.
Il se découragea un peu. Mais il fit encore un effort:
- Ce sera gentil, tu sais. Moi aussi je regarderai les étoiles. Toutes les étoiles seront des puits avec une poulie rouillée. Toutes les étoiles me verseront à boire...
Moi je me taisais.
- Ce sera tellement amusant! Tu auras cinq cents millions de grelots, j'aurai cinq cent millions de fontaines...
Et il se tut aussi, parce qu'il pleurait...
- C'est là. Laisse moi faire un pas tout seul.
Et il s'assit parce qu'il avait peur.
Il dit encore:
- Tu sais... ma fleur... j'en suis responsable! Et elle est tellement faible! ET elle est tellement naive. Elle a quatre épines de rien du tout pour la protéger contre le monde...
Moi je m'assis parce que je ne pouvais plus me tenir debout.
Il dit:
- Voilà... C'est tout...
Il hésita encore un peu, puis se releva. Il fit un pas. Moi je ne pouvais pas bouger.
Il n'y eut rien qu'un éclair jaune près de sa cheville. Il demeura un instant immobile. Il ne cria pas. Il tomba doucement comme tombe un arbre.
Ca ne fit même pas de bruit, à cause du sable.

viernes, 17 de febrero de 2006

El desierto de los tártaros

Dinno Buzzati

Buzzati nació en 1906 en la antigua ciudad de Belluno, cerca del Véneto y de la frontera con Austraia. Fue periodista y se entregó después a la literatura fantástica. Su primer libro, Bàrnabo delle Montagne, data de 1933; el último, I miracoli di Val Morel, de 1972, el año de su muerte. Su vasta obra, no pocas veces alegórica, exhala angustia y magia. El influjo de Poe y de la novela gótica ha sido declarado por él. Otros han hablado de Kafka. ¿Por qué no aceptar, sin desmedro alguno de Buzzati, ambos ilustres magisterios?
Este libro, que es acaso su obra maestra y que ha inspirado un hermoso filme de Valerio Zurlini, está regido por el método de la postergación indefinida y casi infinita, caro a los eleatas y a Kafka. El ámbito de las ficciones de kafka es deliberadamente gris y mediocre y sabe a burocracia y a tedio. Tal no es el caso de esta obra. Hay una víspera, pero es la de una enorme batalla, temida y esperada. Dino Buzzati, en estas páginas, retrotae la novela a la epopeya, que fue su manantial. El desierto es real y es simbólico. Está vacío y el héroe espera muchedumbres. (Prólogo de Jorge Luís Borges para El Desierto de los Tártaros )
***Hasta entonces había avanzado por la despreocupada edad de la primera juventud, un camino que de niño parece infinito, por el que los años discurren lentos y con paso ligero, de modo que nadie nota su marcha. Se camina plácidamente, mirando con curiosidad alrededor, no hay ninguna necesidad de apresurarse, nadie nos hostiga por detrás y nadie nos espera, también los compañeros avanzan sin aprensiones, parándose a menudo a bromear. Desde las casas, en las puertas, las personas mayores saludan benignas y hacen gestos indicando el horizonte con sonrisas de inteligencia; así el corazón empieza a latir con heroicos y tiernos deseos, se saborea la víspera de las cosas maravillosas que esperan más adelante; aún no se ven, no, pero es seguro, absolutamente seguro, que un día llegaremos a ellas.
¿Queda aún mucho? No, basta con atravesar aquel río de allá al fondo, con franquear aquellas verdes colinas. ¿No habremos llegado ya, por casualidad? ¿No son quizá estos árboles, estos prados, esta blanca casa lo que buscábamos? Por unos instantes da la impresión de que sí y uno quisiera detenerse. Después se oye decir que delante es mejor y se reanuda sin pensar un camino.
Así se continúa andando en medio de una espera confiada, los días son largos y tranquilos, el Sol resplandece alto en el cielo y parece que nunca tiene ganas de caer hacia poniente.
Pero a cierto punto, casi instintivamente, uno se vuelve hacia atrás y ve que una verja se ha atrancado a sus espaldas, cerrando la vía del retorno. Entonces se siente que algo ha cambiado, el Sol ya no parece inmóvil, sino que se desplaza rápidamente, ¡ay!, casi no da tiempo de mirarlo y ya se precipita hacia el límite del horizonte; uno advierte que las nubes ya no se estancan en los golfos azules del cielo, sino que huyen superponiéndose unas a otras, tanta es su prisa; uno comprende que el tiempo pasa y que el camino un día tranquilo tendrá que acabar también.
Cierran a cierto punto a nuestras espaldas una pesada verja, la cierran con velocidad fulminante y no da tiempo de regresar. Pero Giovanni Drogo en ese momento dormía, ignorante, y sonreía en sueños como hacen los niños.
Pasarán días antes de que Drogo comprenda lo que ha sucedido. Será entonces como un despertar. Mirará a su alrededor, incrédulo; después oirá un pataleo de pasos que llegan a sus espaldas, verá la gente que, despertada antes que él, corre afanosa y se le adelanta para llegar primero. Oirá el latido del tiempo escandir ávidamente la vida. A las ventanas ya no se asomarán risueñas figuras, sino rostros inmóviles e indiferentes. Y si él pregunta cuánto camino queda, ellos señalarán el nuevo horizonte, sí, pero sin ninguna bondad y alegría. Mientras tanto los compañeros se perderán de vista, alguno se queda atrás, agotado; otro ha escapado delante; ahora ya no es sino un minúsculo punto en el horizonte.
*** Poco a poco la confianza se debilitaba. Es difícil creer en algo cuando uno está solo y no puede hablar de ello con nadie. Precisamente en esa época Drogo se dió cuenta de que los hombres, por mucho que quisieran, siempre permanecen alejados; si uno sufre, el dolor es completamente suyo, ningún otro puede tomar para sí ni una mínima parte; si uno sufre, no por eso los otros sienten el daño, aunque el amor sea grande, y eso provoca la soledad en la vida.
*** Y, sin embargo, un día advirtió que hacía bastante tiempo que ya no iba a cabalgar por la explanada de detrás de la fortaleza. Advirtió incluso que no tenía ningunas ganas y que en los últimos meses (quién sabe exactamente cuántos) ya no subía las escaleras a la carrera, de dos en dos. Bobadas, ha pensado, físicamente se sentía siempre lo mísmo, todo estaba a punto de empezar, no cabía la menor duda; una prueba habría sido ridículamente superflua.
No, físicamente Drogo no ha cambiado, si reanudara las cabalgatas y las carreras escaleras arriba sería muy capaz, pero no es eso lo que importa. Lo grave es que ya no tiene ganas, que prefiere quedarse dormitando al sol después de comer en vez de corretear de un lado o otro por la pedregosa explanada. Esto es lo que cuenta, sólo eso registra los años transcurridos.

martes, 7 de febrero de 2006

L'amant perillosa - Al sud de la frontera, a l'oest del sol


_Al sud de la frontera, a l'oest del sol_ va dir.
_ A l'oest del sol?
_Existeix, un lloc així_ va fer_. ¿No has sentit parlar d'una malaltia que es diu hysteria siberiana?
_ No.
_ Ho vaig llegir en algun lloc fa molt temps. Potser quan feia primer o segon a l'institut. No recordo en quin llibre era, però el fet és que afecta el pagesos que viuen a Sibèria. Intenta imaginar-t'ho. Ets pagès i vius tot sol a la tundra siberiana. Cada dia llaures els camps. Fins a on t'arriba la vista, no hi ha res. Al nord, l'horitzó, a l'est, l'horitzó, a l'oest, l'horitzó. Res més. Cada matí, quan el sol s'alça per l'est, vas a treballar als camps. Quan el sol és ben amunt, descanses i dines. Quan es pon per l'oest, tornes a casa a dormir.
_ No s'assembla gaire a la vida d'un propietari d'un bar d'Aoyama.
_ No, no gaire_ va fer amb un sonriure. Aleshores va inclinar el cap lleugerament_. Tanmateix, el cicle continua, any rere any.
_ Però a Sibèria no llauren pas els camps, a l'hivern.
_ A l'hivern descanses, és clar_va dir_. Es queden a casa i fan altres feines. Quan arriba la primavera, tornen a sortir als camps. Ets aquest pagès. Imagina-t'ho.
_ Mot bé_ vaig dir.
_I aleshores, un dia es mor alguna cosa dintre teu.
_¿Què vols dir?
Va fer que no amb el cap.
_No ho sé. Alguna cosa. Dia rere dia veus com el sort surt per l'est, travessa el cel i es pon per l'oest, però un bon dia alguna cosa es trenca dintre teu i es mor. Deixes l'arada i, sense pensar en res, comences a caminar cap a l'oest. Cap a l'oest del sol. Continues caminant com un posseït, un dia rere l'altre, sense menjar ni beure, fins que caus a terra i et mors. Això és la hysteria siberiana.
Vaig intentar evocar l'imatge d'un pagès siberià mort, estirat a terra de bocaterrosa.
_ ¿Però què hi ha, a l'oest del sol?_li vaig preguntar.
Va tornar a fer que no amb el cap.
_No ho sé. Potser no hi ha res. O potser hi ha alguna cosa. Sigui com sigui, deu ser diferent del sud de la frontera.
Quand Nat King Cole va començar a cantar <>, Shimamoto es va posar a cantar en veu baixa, tal como feia anys enrere.

Pretend you're happy when you are blue
It isn't very hard to do